GAMES OF THRONES SAISON 8 – CRITIQUE

Voilà, c’est terminé. Attendue depuis la fin de l’été 2017, cette saison 8 vient de s’achever, et avec elle une des meilleures séries de tous les temps ayant débuté le 17 mai 2011. La tâche s’avérait ardue tant le récit était riche en sous-intrigues et arcs narratifs de personnages. Le budget par épisode ayant triplé, on pouvait espérer une plus grande qualité visuelle (ce qui était déjà un standard assez élevé dans la série), se rapprochant de plus en plus d’un film de cinéma. Alors, que vaut cette saison finale tant attendue ? On va essayer de répondre à cette question en faisant l’état du travail visuel et narratif accompli ici, sans tenir compte des attentes portées sur cette conclusion.

Attention SPOILERS.

Il semble que cette saison finale ait énormément divisé le public, et qu’il y ait des insatisfaits, c’est normal, rare sont les conclusions qui arrivent à ne décevoir personne (Breaking Bad, Twin Peaks et The Leftovers en sont les récentes exceptions). Cependant, les attentes des spectateurs sont parfois surréalistes et relèvent plus du fantasme que d’une vraie volonté de faire avancer le récit de la meilleure manière.

Si les 2 premiers épisodes ont été généralement très appréciés, malgré les nombreuses ellipses auxquelles il est encore difficile de s’habituer depuis la saison 7, c’est à partir de l’épisode 3, lors de la Bataille de Winterfell, quand la série devait prendre des choix cruciaux, que la tendance a commencé à changer drastiquement. Beaucoup se sont plaints qu’Arya tue le Night King à la place de Jon (selon la prophétie), mais aussi de la faible luminosité de l’épisode, rendant certains passages difficilement lisibles.

Il est vrai qu’augmenter légèremennt la luminosité à l’étalonnage n’aurait pas été de trop, cependant cela découle d’une intention de mise en scène assez logique : plonger le spectateur dans les mêmes conditions (le froid en moins) que les personnages, donc la nuit noire, assombrie par le brouillard et avec seulement des torches pour s’éclairer. Malgré ce problème, la réalisation reste assez impressionnante et offre de nombreux plans magnifiques. Quant à la mort du Night King, après avoir mis en échec Daenerys (perdue dans le brouillard avec Drogon), et Jon Snow, laissé seul au milieu d’une horde de zombies, toute les chances étaient de son côté pour l’emporter. Le bougre était tellement convaincu de sa victoire qu’il tombe dans l’arrogance avec un rictus diabolique après avoir résisté au fameux « Dracarys ». C’était sans compter le culot d’Arya et ses talents d’infiltration. Cependant, passer au moins 2 épisodes sur cette bataille et sur la résolution de l’intrigue des marcheurs blancs aurait été grandement bénéfique, tant tout paraît précipité.

Vient ensuite l’épisode 5 et la bataille de King’s Landing pour prendre le Trône de Fer. Si la réalisation est bluffante, l’écriture ici est peu convaincante. Arrêtons-nous quelques instants sur le développement de Daenerys dans cet épisode. Si le fait qu’elle devienne folle n’est pas incohérent en soi, car cela a toujours été une possibilité (c’est la fille du « Mad King »), le fait est que l’exécution paraît précipitée et laisse perplexe. Explications.

Daenerys a gagné la guerre, l’armée s’est rendue, il ne reste plus qu’à aller prendre le Trône et tuer Cersei qui, rappelons-le, a causé la mort de Missandei et de deux de ses dragons. Sauf qu’au lieu de ça, elle se met tout à coup à massacrer volontairement l’entièreté de la population, femmes et enfants compris. Alors oui, Daenerys a toujours fait preuve d’accès de colère, mais aussi disproportionnés qu’ils pouvaient être, c’était toujours dirigé contre un traître, ses ennemis ou leurs serviteurs, jamais envers des innocents. Elle s’est toujours montrée comme la Reine du petit peuple, libérant les faibles du joug des oppresseurs. Mais ici, elle les exécute froidement, alors qu’ils n’avaient absolument pas pris parti pour Cersei. De plus, avec la méfiance grandissante du côté de ses alliés, il était fort probable qu’elle ne finirait pas sur le Trône, ou du moins qu’elle n’y resterait pas longtemps.

Alors pourquoi la faire devenir folle au point de trahir soudainement ses valeurs sans raison valable ? Le temps, probablement. Cela justifie plus vite sa mort dans le prochain épisode, qui n’aurait pas eu le temps d’installer un véritable coup d’état et terminer la série en même temps.

Dommage car cela aurait été bien plus intéressant qu’elle échoue à cause de la peur des autres de son héritage psychologique, alors qu’elle garde le contrôle, plutôt que de sombrer dans la folie et donner raison à tout le monde. Surtout que cela donne l’impression qu’on ne peut pas transcender son patrimoine génétique, alors qu’elle aurait pu prouver que ça ne définit pas qui on est, ou ce qu’on devient.

Bref, passons cette décision pour terminer la série à la hâte. Venons-en à l’épisode final. Ici, rien à redire sur la première moitié de l’épisode, le rythme trop rapide mis à part mais c’est un problème général. La réalisation était encore une fois de toute beauté, et la scène de Drogon qui découvre le corps inanimé de Dany, pour ensuite brûler le Trône, symbole de son obsession qui l’a menée à sa perte, c’était vraiment sublime, et impressionnant visuellement.

Après par contre… Je reste encore assez perplexe sur le couronnement de Bran Stark. Déjà parce que ça n’a pas du tout été envisageable, nous faisant comprendre que son rôle était tout autre. Puis les arguments en sa faveur sont un peu douteux, hormis le fait qu’il ne puisse pas avoir d’héritier, le fait d’être désintéressé du pouvoir, mais aussi d’avoir une grande histoire qui le précède, étaient des arguments tout à fait applicables à Jon ou Tyrion. De fait, si cette résolution ne me donne ni envie d’applaudir ni de crier au scandale, l’exécution me paraît encore une fois maladroite.

En somme, cette saison 8 est ultra spectaculaire et épique, mais l’écriture, qui précipite grandement les choses au détriment du développement des personnages est à déplorer. Le problème réside fondamentalement sur le nombre d’épisodes. Difficile de comprendre pourquoi les showrunners ont décidé de terminer la série en 13 épisodes après la saison 6, au lieu de 20 épisodes, et faire ainsi des saisons complètes. HBO leur avait pourtant donné carte blanche sur le nombre d’épisodes et le budget, donc en voyant le résultat, on se dit que 7 épisodes en plus étaient peut-être un luxe qu’ils auraient dû se payer.

Toutefois, ces défauts ne gâchent pas la globalité de la série, qui reste une des meilleures jamais faites et qui a de toute évidence changé la façon de concevoir les séries télévisées. Merci pour tout, c’était phénoménal.

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