TOP 50 ANNÉES 2010

Nous sommes à présent en 2020. Il est donc l’heure de faire le bilan sur ces dix dernières années de cinéma. J’ai essayé de faire transparaître ma vision du cinéma, en tentant de classer ces films en fonction desquels allaient me marquer le plus, et s’imposer comme des références pour les années à venir. Vous vous doutez bien qu’il y a encore une palanquée de bons films que je n’oublierai pas, mais le but du jeu était d’en choisir 50, donc voici ceux qui me viendront probablement à l’esprit le plus spontanément quand j’évoquerai cette décennie cinématographique. Je me suis cependant imposé une règle : pas plus de deux films par réalisateur, à laquelle j’ai accordé une seule exception pour un film d’un cinéaste en particulier. Cette liste m’est très personnelle, donc pas la peine de s’offusquer qu’un de vos films préférés n’y figure pas, ou n’est pas classé assez haut. J’ai simplement tenté d’imaginer quelles seraient mes principales références cinématographiques de cette décennie, si l’on me posait la question dans quelques années. Je vous présente donc mon Top 50 des films des années 2010 !


TOP 50


50. ONLY LOVERS LEFT ALIVE

Réalisé par Jim Jarmusch

Outre la beauté du titre, ce long-métrage de Jim Jarmusch revient de façon assez originale sur une des créatures les plus célèbres, avec au programme deux vampires amoureux à notre époque, dans un film parcouru par un certain spleen sur fond de guitare électrique. L’atmosphère lancinante et les teintes de couleurs chaudes rendent une douceur assez palpable, contrastant avec l’aspect sanguinaire des vampires. Le personnage incarné par Tom Hiddleston vit reclus, limitant les interactions humaines (qu’il surnomme « zombies ») à l’approvisionnement de sang et à son attrait pour la musique. En plus de proposer une modernisation du mythe du vampire, transposé au 21ème siècle, Jim Jarmusch, s’interroge, à travers ces êtres immortels, sur l’héritage de l’Art à travers les époques, et l’évolution de la créativité des Hommes. Envoûtant.

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49. LA CHASSE

Réalisé par Thomas Vinterberg

Rarement un film m’aura autant énervé. Rassurez-vous, sa qualité n’est pas mise en cause ici, en témoigne sa place dans ce Top. Le film parle de Lucas, un professeur d’école maternelle, se retrouvant accusé à tort de pédophilie. Thomas Vinterberg vient s’intéresser ici aux conséquences de cette accusation au sein du milieu social dans lequel évolue Lucas. Comment son entourage, ses voisins, ses collègues, ou les autres habitants vont réagir, et surtout comment Lucas va gérer cette tempête dirigée injustement contre lui. Mads Mikkelsen, récompensé du Prix d’interprétation à Cannes, tient ici un de ses meilleurs rôles, dans ce portrait d’un homme brisé, acculé, tentant de garder sa dignité, pendant que sa vie semble s’écrouler. La séquence à l’église est une des plus saisissantes de sa carrière. La Chasse est tableau sombre d’une société faisant sa propre justice, face au désespoir d’un homme demandant juste l’ouverture d’esprit et l’écoute de ses pairs. Un film qui a d’autant plus de résonance de nos jours avec le mouvement « Me Too », démontrant que si la libération de la parole est indéniablement positive et libératrice, certaines déviances appellent à la prudence.

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49. MUD, SUR LES RIVES DU MISSISSIPI

Réalisé par Jeff Nichols

Mud est une confirmation que Jeff Nichols est un des cinéastes les plus intéressants de cette décennie (et à venir espérons-le). Dans ce très beau récit initiatique, deux jeunes garçons vont rencontrer sur un îlot un ermite dénommé Mud (campé par Matthew McConaughey), et décideront de l’aider à partir retrouver son amour de jeunesse, la belle et énigmatique Juniper (Reese Witherspoon). Ici, le milieu social des personnages n’est absolument pas utilisé à des fins misérabilistes, mais plutôt comme un contexte, dans lequel ils se permettent de rêver, et de repousser leurs limites. Jeff Nichols livre une mise en scène épurée, sublimant les grands espaces fluviaux de cette région, décor idyllique pour laisser place aux aspirations des personnages. Si Mud navigue habilement entre les genres, passant du drame romantique au thriller, ou au film d’aventure, c’est avant tout un film sur l’enfance, probablement l’un des plus beaux de ces dernières années, puisant sa force dans un lyrisme romantique et rêveur.

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47. SNOWPIERCER

Réalisé par Bong Joon-ho

En 2031, la planète est plongée dans une ère glaciaire totale, et les derniers survivants vivent dans un train tournant autour du globe, dans lequel les schémas sociétaux sont conservés. Pour son premier film en anglais, Bong Joon-ho choisi d’adapter une bande-dessinée Française, et s’entoure d’un casting de talent : Chris Evans, Tilda Swinton, John Hurt, Ed Harris, Octavia Spencer, et son acteur fétiche depuis Memories of Murder : le brillant Song Kang-ho. Une histoire totalement en adéquation avec les problématiques sociales qu’affectionne le cinéaste Coréen, dans laquelle s’opèrera une véritable lutte des classes à bord de ce train à grande vitesse. Ce qui est très intéressant dans ce film, c’est qu’à chaque fois que les personnages pénètrent dans un nouveau wagon, le décor change radicalement, et la mise en scène change de style aussi. C’est un film qui se renouvelle constamment, pour proposer un spectacle effréné, sur fond d’inégalités sociales.

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46. ONCLE BOONMEE, CELUI QUI SE SOUVIENT DE SES VIES ANTÉRIEURES

Réalisé par Apichatpong Weerasethakul

Palme d’Or en 2010, Oncle Boonmee est une expérience pour le moins singulière mais très intéressante. Ce qui frappe dans ce film c’est d’y voir une culture, un système de croyances nettement différent de nous occidentaux, mais en même temps assez familier pour y être sensible. Cette plongée dans la jungle Thaïlandaise, à travers les derniers moments de vie d’un agriculteur, nous apporte une vision de l’au-delà assez originale, entre apparitions fantomatiques et réincarnation en esprit animal (les fameux singes fantômes). L’atmosphère du film dégage une sérénité déconcertante de beauté, notamment grâce à un travail sonore captant chaque bruitage naturel avec une grande authenticité. Le rythme se veut lent, comme une longue mais paisible attente de la mort. Laissez-vous porter dans cette jungle presque onirique, pour les derniers instants de la vie de Boonmee.

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45. MOMMY

Réalisé par Xavier Dolan

Ce n’est pas un hasard si Mommy est le film le plus acclamé de Xavier Dolan. Pour son cinquième long-métrage, il opte pour format carré en 1:1 afin de souligner l’enfermement psychologique des personnages (il en jouera à deux reprises), ce qui confère également des plans « portraits » réellement sublimes. Dolan fait tout pour mettre en valeur ses comédiens, tous assez fabuleux, il faut le noter. Il est d’ailleurs flagrant que le jeune cinéaste (24 ans lors du tournage) aime profondément ses personnages, posant un regard sans aucun jugement, plein de compassion, permettant aux acteurs de se libérer et de nous offrir de grands moments d’émotion. Outre son talent de mise en scène indéniable, Xavier Dolan arrive toujours à proposer de très belles séquences musicales, figurant ici parmi les plus mémorables du film comme celles avec Wonderwall d’Oasis et On ne change pas de Céline Dion. La figure maternelle qui l’obsède à travers sa filmographie trouve ici son sommet, dans cet émouvant portrait de laissés pour compte cherchant à briser les limites que leur impose la vie.

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44. STEVE JOBS

Réalisé par Danny Boyle

Voilà un très bel exemple du biopic qui sort complètement des codes de son genre. Ici, on ne va pas suivre la vie de l’ancien PDG d’Apple de manière linéaire en s’attardant sur son enfance ou ses débuts dans son garage avec Steve Wozniak. Le film est structuré en 3 parties distinctes, chacune se concentrant les moments précédents les fameuses « keynotes » lors du lancement d’un produit. Si la structure du scénario d’Aaron Sorkin est déjà très intéressante, et permet de raconter des choses sur la vie personnelle de Steve Jobs et sur sa façon de travailler, on est évidemment servis par des dialogues de haute volée donnant un rythme effréné au récit. Le style d’écriture du célèbre scénariste confère au film une ambiance effervescente, notamment grâce aux dialogues et au déroulement en temps réel de chaque partie, représentant parfaitement ce fourmillement que doit être l’organisation de conférences de genre. La mise en scène de Danny Boyle n’est pas en reste également, et propose déjà un style visuel intéressant, en filmant chaque partie avec un type de caméra (en pellicule 16mm, 35mm, puis une caméra numérique HD) différent, puisque l’histoire se déroule à 3 époques différentes. Michael Fassbender offre peut-être la meilleure performance de sa carrière, et arrive à transmettre à la fois toute l’arrogance, mais aussi l’humanité de Jobs. Certaines séquences de dialogues sont assez impressionnantes, presque étouffantes, tant on est pris dans un tourbillon de colère, de doute, et d’idées.

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43. MELANCHOLIA

Réalisé par Lars Von Trier

Difficile de mettre des mots sur l’expérience qu’est Melancholia. Divisé en deux parties, chacune adoptant le point de deux sœurs. La première se concentre sur le mariage de Justine (brillamment incarnée par Kirsten Dunst), et la seconde sur sa sœur Claire (Charlotte Gainsbourg, habituée des films de Lars Von Trier), à l’aube d’une potentielle catastrophe naturelle. Dans ce mariage censé représenter l’amour, le bonheur et célébrer la vie, le réalisateur Danois vient le prendre à revers, pour en dépeindre la destruction des rapports familiaux, et sociaux, à travers l’état psychologique de Justine. Dans la deuxième partie, à l’approche de cette catastrophe, il est intéressant d’observer les différents comportements humains, ici radicalement différents chez Claire, son mari (Kiefer Sutherland rarement vu aussi juste), et sa sœur Justine. Lars Von Trier varie sa mise en scène, entre une caméra épaule quasi documentaire, et des séquences au ralenti ressemblant à des tableaux, et propose un film aussi beau que cruel sur la fin du monde.

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42. A GHOST STORY

Réalisé par David Lowery

Prix du Jury, de la Critique, et de la Révélation au Festival de Deauville 2017, A Ghost Story raconte l’histoire du fantôme d’un homme revenant observer sa femme en deuil, et la vie qui fût la sienne. Ici, rien d’effrayant. Le fantôme est représenté comme pourrait le dessiner un enfant de 7 ans : une silhouette sous un drap blanc, avec des trous pour les yeux. L’histoire se déroule de son point de vue, et non de la personne qu’il hante. Le temps n’a plus d’emprise sur lui, les époques défilant aussi vite que les jours pour lui. À travers ce que ressent le fantôme, nous sommes confrontés à la notion de deuil, de l’empreinte qu’on laisse derrière nous, et au temps qui passe. Le film se compose de nombreux plans séquences assez longs, mais la photographie est magnifique et s’en dégage une telle mélancolie qu’il est difficile d’y rester insensible. Il y a peu de dialogues, mais le silence du fantôme veut parfois dire plus qu’il n’y paraît. Il contemple le monde avancer sans lui, sans rien pouvoir y faire, ni trouver ce qui lui permettra d’enfin se reposer. A Ghost Story est une véritable expérience sensorielle, expérimentale, dont la forme pourra en laisser certains sur le carreau, mais c’est une réflexion profonde sur la mort, et de l’empreinte qu’on laissera sur le monde.

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41. J’AI RENCONTRÉ LE DIABLE

Réalisé par Kim Jee-woon

Je ne répèterai jamais assez que le cinéma Coréen est extrêmement intéressant, avec cette poignée de grands cinéastes ayant émergé depuis les années 2000. Kim Jee-woon en fait clairement partie, et nous offre ici son film le plus sombre et sanglant de sa carrière. J’ai Rencontré le Diable définit probablement le mieux ce qu’est un film de vengeance. Après avoir perdu un être cher des mains d’un tueur en série, Soo-Hyun va entreprendre une traque implacable de ce tueur, et lui faire endurer les pires souffrances possibles pour se venger. On est donc plongés dans un jeu du chat et de la souris impitoyable, et absolument jusqu’au-boutiste. Si vous aimez les films violents au ton grinçant, et que le postulat du film de vengeance vous intéresse, foncez, c’est tout simplement un des meilleurs films du genre.

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40. AMOUR

Réalisé par Michael Haneke

Palme d’Or en 2012, ce film de Michael Haneke réunit deux grands acteurs Français, Jean-Louis Trintignant et Emmanuelle Riva. Amour raconte l’histoire de Georges et Anna, un couple d’octogénaires, qui devra faire face aux graves problèmes de santé d’Anna, après qu’une attaque cérébrale lui ait paralysé un côté du corps. Vous vous doutez bien que vu le pitch, ce n’est clairement pas une histoire joyeuse. Cependant, ce n’est pas larmoyant non plus. Dans ce huis-clos, l’enjeu est de voir comment, par l’amour qui les unit, ce couple tentera de faire face à cette terrible épreuve, en gardant leur dignité. La mise en scène permet de très beaux moments, explorant les recoins de cet appartement pour y dépeindre un beau et tragique drame intimiste sur la vieillesse. Jean-Louis Trintignant est d’une justesse encore épatante à son âge, et Emmanuelle Riva livre une performance impressionnante de lâcher-prise corporel, nous mettant face à l’impuissance que peut provoquer une maladie. Un film aussi beau qu’il est dévastateur.

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39. TEL PÈRE, TEL FILS

Réalisé par Hirokazu Kore-eda

Deux familles apprennent que leurs fils ont été échangés à la naissance, et devront décider s’ils feront à nouveau l’échange pour élever leur enfant biologique. Avant sa Palme d’Or en 2018 pour Une Affaire de Famille, Hirokazu Kore-eda avait remporté le Prix du Jury pour Tel Père tel Fils en 2013. Dans ce drame intimiste, le cinéaste Japonais explore à nouveau les thématiques qui lui sont chères comme les liens familiaux, et va se pencher plus particulièrement sur le père d’une des deux familles, pour traiter le lien avec son fils. On a également une opposition sociale à travers ces deux familles, l’une vit très modestement en banlieue, et l’autre dans un appartement classieux à Tokyo. Ce père, très travailleur et soucieux que son fils soit au top socialement et intellectuellement, éprouve des difficultés à se lier à lui, considérant qu’il n’est pas à la hauteur de ses attentes. C’est pour cela qu’en apprenant que ce n’est pas son fils biologique, il lui vient l’idée de faire l’échange pour retrouver son vrai fils, qui est censé plus lui ressembler. Cependant, les liens de parenté ne font pas tout, et c’est ce que devra réaliser ce père. Cette histoire est d’autant plus forte qu’elle se passe au Japon, puisque c’est un peuple qui éprouve une grande difficulté à exprimer clairement leurs émotions, pour rester digne en toute situation. Kore-eda nous livre une nouvelle fois un très beau et émouvant drame familial, avec la délicatesse d’écriture et de mise en scène qui fait sa patte.

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38. THE GHOST WRITER

Réalisé par Roman Polanski

Un écrivain est choisi pour continuer d’écrire les mémoires d’un ancien Premier Ministre, après la mort mystérieuse de son prédécesseur. Roman Polanski livre probablement ici un de ses meilleurs films, avec ce passionnant thriller politique. Bien aidé par Ewan McGregor, toujours aussi impeccable, et Pierce Brosnan qui tient probablement un de ses rôles les plus intéressants de sa carrière. Le scénario, adapté du roman de Robert Harris, est d’une intelligence remarquable, entretenant rigoureusement le mystère, pour mieux déployer la force de son jeu de marionnettes. Un récit dans lequel le cinéaste se permet d’attaquer frontalement l’hypocrisie politique et l’impérialisme américain. Sa mise en scène, élégante et subtile, offre une maîtrise du suspense presque Hitchcockienne. A ce titre, les 15 dernières minutes sont absolument magistrales, un vrai sommet de tension aussi virtuose que terrifiant.

Bande-annonce :

https://youtu.be/auphd-Bvzi0

37. INSIDE LLEWYN DAVIS

Réalisé par Joel et Ethan Coen

En allant moins à fond dans la comédie absurde qu’à l’accoutumée, les frères Coen proposent ici un drame intimiste, à l’atmosphère chaleureuse, ponctué par quelques touches d’humour. On va suivre ici pendant quelques jours les tribulations de Llewyn Davis (campé par Oscar Isaac), un chanteur folk en quête de succès, à travers le New-York des années 60. Ce personnage est très attachant, car il est profondément humain. Il traîne ses qualités et ses défauts au quotidien, et c’est intéressant parce qu’on ne peut pas vraiment complètement prendre parti pour ou contre lui, puisque par moments on le plaint et on voudrait qu’il réussisse, mais il s’avère aussi parfois désagréable et irresponsable, ce qui ne l’aide vraiment pas. Avec ce personnage de musicien, on a droit à quelques séquences de musique folk qui participent à la douceur de l’atmosphère du film. On y retrouve notamment Justin Timberlake, mais aussi Carey Mulligan, et Adam Driver donnant modestement de leur voix avec Oscar Isaac. La photographie du Français Bruno Delbonnel (Harry Potter 6, Amélie Poulain), offrant de très beaux jeux de lumières, et une colorimétrie s’accordant parfaitement avec l’hiver ambiant. Grand prix à Cannes en 2013.

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36. THE HOUSE THAT JACK BUILT

Réalisé par Lars Von Trier

En 2018 Lars Von Trier signe son retour très attendu dans les salles obscures, avec The House that Jack Built, contant l’histoire de Jack (brillamment interprété par Matt Dillon), un ingénieur solitaire, et tueur en série à ses heures perdues. C’est un film d’une densité remarquable, tant sur la forme, que le fond. Il dispose en effet de plusieurs grilles de lecture : une comédie noire sur un serial-killer, une introspection du cinéaste Danois sur son rapport à l’Art, ou bien une descente dans les profondeurs les plus sombres de l’âme humaine, tentant d’apporter une réflexion sur le Mal. Comme pour Melancholia, Lars Von Trier use d’une mise en scène naturaliste, au plus près des personnages, mais prend le temps de composer de superbes cadres picturaux, comme celui sur l’image ci-dessus, reproduisant La Barque de Dante, le célèbre tableau de Delacroix. Un des films les plus intéressants de la décennie.

Vous pouvez retrouver la critique complète ici.

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35. READY PLAYER ONE

Réalisé par Steven Spielberg

Adapté du livre du même nom, Ready Player One est un film ayant énormément divisé à sa sortie. Pour ma part, en témoigne de sa place dans ce Top, c’est un des blockbusters les plus aboutis et intéressants de la décennie. La présence de Steven Spielberg derrière la caméra n’y est clairement pas pour rien. Le cinéaste propose des séquences d’action ébouriffantes, à l’image de cette course-poursuite dantesque au début du film, ou cette grande guerre pendant le climax. Ready Player One c’est aussi une façon de s’interroger sur notre rapport à la pop-culture. La plupart des critiques négatives décriaient l’impressionnant flot de références au sein du film, alors que celles-ci font simplement parti d’un décor, qui ne nécessite pas de toutes les identifier. Bien au contraire, dès le départ de la course-poursuite lorsqu’un personnage s’enthousiasme de reconnaître la moto du film Akira, son ami lui fait comprendre que c’est sur le pilote qu’il faut porter son attention. Un moyen de dire que simplement citer des références ne suffit pas, ce qui compte c’est la façon de les utiliser, d’en parler, comment se les approprier pour créer quelque chose d’unique. Il est aussi intéressant de voir que parmi ces références, on y trouve certaines des œuvres de Spielberg, comme Jurassic Park, ce qui lui permet au passage de se questionner sur son propre héritage culturel. On retrouve dans le casting notamment le jeune Tye Sheridan (Tree of Life, Mud), mais aussi Ben Mendelsohn (Rogue One : A Star Wars Story), décidément à l’aise pour jouer les antagonistes. La post-production du film fût tellement longue du fait des nombreux effets spéciaux, que le cinéaste a tourné, et sorti quelques mois avant Pentagon Papers, un drame politique hautement maîtrisé, prouvant qu’il en a encore pas mal dans le réservoir, même à plus de 70 ans. Steven Spielberg convoque ici tout son génie de mise en scène pour proposer un film grand spectacle, tout en gardant une portée thématique intimiste, et les yeux rêveurs.

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34. BOYHOOD

Réalisé par Richard Linklater

L’existence même de ce film est assez dingue. Pour cause, Richard Linklater et son équipe ont tourné quelques jours chaque année pendant 12 ans, pour suivre l’évolution d’un petit garçon et suivre sa vie durant son enfance et son adolescence. S’en dégage une vérité très touchante, pourtant très difficile à tenir sur un tournage aussi éparse et long. Le projet aurait pu se perdre en chemin maintes et maintes fois au cours des années, mais il n’en est rien. On suit cet enfant et sa famille traverser leur vie avec une authenticité remarquable sublimant chaque petit moment anodin d’une vie. A ce titre, il est fort probable que vous vous reconnaissiez dans le parcours de Mason, incarné avec brio par le jeune Ellar Coltrane, que l’on voit donc littéralement grandir à l’écran.

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33. JUSTE LA FIN DU MONDE

Réalisé par Xavier Dolan

Attendu au tournant après le grand succès de Mommy en 2014, Xavier Dolan revient cette fois avec l’adaptation d’une pièce de théâtre, épaulé par un casting de talent. Pari réussi puisqu’après le Prix du Jury, , le jeune cinéaste remporte cette fois le Grand Prix du Festival de Cannes. Mis à part une séquence de balade en voiture, on a affaire ici à un huit-clos, prenant place lors d’un repas de famille. Louis (Gaspard Ulliel) revient après 12 ans d’absence chez lui pour renouer avec sa famille mais aussi leur annoncer qu’il va mourir. Dolan en profite pour utiliser à foison les très gros plans qu’il affectionne, pour capter au mieux les émotions des personnages, accentuant cette impression d’enfermement psychologique. En effet, ce qui est intéressant ici, c’est le fait que cette famille n’arrive pas à se dire les choses. Chacun aurait quelque chose sur le cœur à dire à l’autre, mais éprouve d’immenses difficultés à l’exprimer. Le malaise généré par l’absence et le retour soudain de Louis bouleverse ses proches, et les voir s’efforcer de passer un bon moment est d’autant plus triste qu’une bombe est sous la table dans les mains de Louis. Marion Cotillard a rarement été aussi douce et touchante, mais le plus surprenant s’avère être Vincent Cassel, qui se sert des capacités qu’on lui connaît pour offrir un tourbillon d’émotions aussi impressionnant que désarmant. Dolan aime diriger ses acteurs et les sublimer à l’image, ce qui permet de faire ressortir des choses qu’on a pas forcément l’habitude de voir chez eux, pour notre plus grand plaisir. Un drame familial émouvant dont la tension rend parfois l’expérience suffocante. Mention spéciale au talent de Xavier Dolan pour utiliser la musique, pour preuve cette séquence sur fond de O-Zone, choix improbable mais qui fonctionne très bien. Je vous laisse avec cette excellente bande-annonce, qui donne un bel aperçu du programme.

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32. AD ASTRA

Réalisé par James Gray

James Gray livre ici son film le plus ambitieux, et probablement un de ses meilleurs. Il est vrai que j’aurais pu choisir The Lost City of Z, son précédent film, tant ils se ressemblent, si bien qu’on pourrait les considérer comme les deux faces d’une même pièce, avec la quête du père pour le premier, et celle du fils pour le second. Mais personnellement, c’est Ad Astra qui me parle et me fascine le plus. Ce voyage spatial, construit comme une thérapie pour le Major McBride, parti retrouver son père disparu depuis 16 ans, dont l’héritage et l’absence le pèse, est assez émouvant. Il devra apprendre à se libérer de cette emprise paternelle, et s’ouvrir à ses émotions, qu’il contient rigoureusement depuis toutes ces années. Brad Pitt a rarement été aussi bouleversant, et la mise en scène élégante de James Gray, couplée à la photographie de Hoyte Van Hoytema (Interstellar, Dunkerque, Her) propose des moments de cinéma d’une beauté folle. Une odyssée spatiale plus introspective que spectaculaire, mais proposant tout de même de sublimes séquences d’action. Avec Ad Astra, James Gray confirme une nouvelle fois qu’il est un cinéaste majeur du 21ème siècle.

Vous pouvez retrouver la critique complète ici.

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31. TAKE SHELTER

Réalisé par Jeff Nichols

Avant de sortir Mud, Jeff Nichols avait déjà frappé fort avec Take Shelter. L’excellent Michael Shannon incarne ici Curtis, un ouvrier qui deviendra sujet à de terribles cauchemars apocalyptiques dont la vision d’une tornade l’obsède. Ces rêves provoqueront chez lui un comportement paranoïaque que sa famille aura du mal à comprendre. Nichols met un point d’honneur à troubler la perception du spectateur, ne sachant pas, jusqu’à la fin, si les visions de Curtis sont réellement prémonitoires, ou le fruit de son esprit malade. On se retrouve alors en empathie avec sa femme (Jessica Chastain), partagée entre la peur et l’envie de le soutenir. A l’instar de Lars Von Trier et son Melancholia, Jeff Nichols s’intéresse au comportement humain face à la vision apocalyptique, qui viendra ici empoisonner l’esprit du personnage, et affecter sa famille, ses collègues, mais aussi son milieu social. Take Shelter est un thriller psychologique palpitant, ne tombant jamais dans la surenchère, proposant une mise en scène au cordeau, et des séquences oniriques terrifiantes, où la nature se déchaîne.

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30. MEKTOUB MY LOVE, CANTO UNO

Réalisé par Abdellatif Kechiche

Avant de sortir Mud, Jeff Nichols avait déjà frappé fort avec Take Shelter. L’excellent Michael Shannon incarne ici Curtis, un ouvrier qui deviendra sujet à de terribles cauchemars apocalyptiques dont la vision d’une tornade l’obsède. Ces rêves provoqueront chez lui un comportement paranoïaque que sa famille aura du mal à comprendre. Nichols met un point d’honneur à troubler la perception du spectateur, ne sachant pas, jusqu’à la fin, si les visions de Curtis sont réellement prémonitoires, ou le fruit de son esprit malade. On se retrouve alors en empathie avec sa femme (Jessica Chastain), partagée entre la peur et l’envie de le soutenir. A l’instar de Lars Von Trier et son Melancholia, Jeff Nichols s’intéresse au comportement humain face à la vision apocalyptique, qui viendra ici empoisonner l’esprit du personnage, et affecter sa famille, ses collègues, mais aussi son milieu social. Take Shelter est un thriller psychologique palpitant, ne tombant jamais dans la surenchère, proposant une mise en scène au cordeau, et des séquences oniriques terrifiantes, où la nature se déchaîne.

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29. ONCE UPON A TIME IN HOLLYWOOD

Réalisé par Quentin Tarantino

Le 9ème film de Quentin Tarantino s’inscrit dans un registre dans lequel on ne l’attendait pas forcément. Au lieu du cocktail survolté de violence habituel, cette fois, le cinéaste prend son temps et contemple, calmement. Une contemplation d’une époque révolue, dont il affectionne particulièrement le cinéma et ses figures. Once Upon a Time in Hollywood est, comme son nom l’indique, un véritable conte de fées, prenant la forme d’une balade de 3 jours à Los Angeles en 1969, au rythme du quotidien de Rick Dalton, un acteur de série TV en passe d’être « has been », son cascadeur et ami Cliff Booth, mais aussi de Sharon Tate, actrice prometteuse et femme de Roman Polanski, avant qu’elle ne soit sauvagement assassinée par les sbires du gourou Charles Manson. Une occasion pour Tarantino de jouer avec la frontière entre le réel et le fictif une nouvelle fois après Inglourious Basterds. Leonardo DiCaprio et Brad Pitt sont absolument géniaux (surtout ce dernier qui atteint un sommet du cool), offrant des séquences destinées à devenir cultes, et Margot Robbie illumine le métrage à chacune de ses apparitions, rendant hommage à la joie de vivre de la regrettée Sharon Tate. Ce film est une véritable déclaration d’amour au cinéma, permettant au cinéaste de prouver que la fiction est le plus beau des refuges contre les horreurs de la réalité, même si ce n’est qu’éphémère. Un de ses meilleurs films et certainement son plus émouvant.

Vous pouvez retrouver la critique complète ici.

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28. DUNKERQUE

Réalisé par Christopher Nolan

C’est peut-être vendre la mèche un peu trop tôt, mais quand je vous parlais d’une exception à la règle de deux films par réalisateur, et bien la voilà. Il m’était impossible de ne pas parler des deux autres films, et en même temps, je tenais à placer celui-ci. Dunkerque semble être un aboutissement dans la carrière de Christopher Nolan. Ce film est une véritable expérience visuelle et sonore. En effet, toute la maîtrise de la mise en scène du cinéaste est déployée, dans un récit encore une fois jouant avec les temporalités, mais surtout, le travail du son est ici particulièrement impressionnant. L’ambiance visuelle et sonore permet au spectateur un sentiment d’immersion totale, donnant l’impression d’être réellement sur ce champ de bataille et de ressentir chaque balle tirée ou chaque bombe explosant à proximité. A cela s’ajoute la bande-son d’Hans Zimmer, renforçant davantage la tension. Dunkerque est une expérience cinématographie des plus saisissantes, dans laquelle il faut se plonger totalement, pour en prendre la pleine mesure. Probablement le meilleur film de guerre depuis longtemps.

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27. DRIVE

Réalisé par Nicolas Winding Refn

Si vous cherchez un énième film d’action à la Fast & Furious, passez votre chemin. Drive oscille plutôt entre le film de braquage, et le mélodrame. C’est cette constante opposition entre un monde violent, et un monde de sentiments, qui parcourt le film, pouvant passer d’un baiser à un crâne fracassé en quelques secondes. C’est le déchirement de ces regards et sourires amoureux, face à la radicalité de la violence, symbole de ce magnifique amour impossible. Carey Mulligan est sublime, et Ryan Gosling extrêmement précis dans son jeu, que certains qualifieront d’inexpressif, mais c’est justement dans les rôles les plus silencieux qu’on reconnaît les bons acteurs. Son rôle est d’autant plus tragique, qu’habitué à la solitude, il tombera amoureux de sa voisine, et se prendra d’affection pour son fils, mais rattrapé par les événements, il devra faire sortir sa part d’animalité violente (le scorpion au dos de sa veste), pour les protéger. La mise en scène (primée à Cannes) de Nicolas Winding Refn fait preuve d’une maîtrise du cadrage épatante, et d’une beauté hypnotique. Le travail sonore est également d’une précision remarquable, auquel s’ajoute une superbe partition de Cliff Martinez et des morceaux typés 80’s comme Nightcall de Kavinsky, désormais indissociable de Drive.

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26. INTERSTELLAR

Réalisé par Christopher Nolan

Cette décennie a été particulièrement marquée par l’émergence de plusieurs films se déroulant dans l’espace, et l’un de ceux qui revient le plus souvent est Interstellar. Christopher Nolan tout son art de la mise en scène perfectionné dans Inception ou la Trilogie The Dark Knight, afin de proposer un grand spectacle aux confins de la galaxie. Si l’on peut sentir l’influence de Stanley Kubrick (2001 l’Odyssée de l’espace est un des films préférés de Nolan), l’objectif est tout autre ici. Si Interstellar fonctionne aussi bien, c’est parce que son propos est d’autant plus pertinent aujourd’hui. Car au-delà de cette émouvante relation père-fille, le film raconte les conséquences de cette crise environnementale, poussant la population dans ses derniers retranchements. Que faire lorsque la Terre ne sera plus habitable ? Partir rechercher d’autres planètes capables d’accueillir la vie humaine, sans aucune garantie de résultat ? Ou se résigner et accepter son sort ? C’est la quête dans laquelle se lance Cooper (incarné avec justesse par Matthew McConaughey), déchiré entre le besoin de trouver une solution pour la survie de l’humanité, et la perspective de ne jamais revoir ses enfants. Certaines séquences sont mémorables, notamment celle où Cooper tente de s’amarrer à une station orbitant à plein vitesse suite à une explosion. Un très grand moment de mise en scène et de tension (je me souviens d’avoir été complètement paralysé dans mon siège au cinéma), couplé à la musique incroyable d’Hans Zimmer, qui livre d’ailleurs une des plus belles bandes originales de la décennie. Christopher Nolan signe ici un nouveau blockbuster, mais toujours avec son regard d’auteur, permettant de lier le grand spectacle aux émotions les plus intimes.

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25. LES HUIT SALOPARDS

Réalisé par Quentin Tarantino

Probablement un des films les plus aboutis de la carrière de Quentin Tarantino, et pourtant tellement sous-estimé. Deuxième western de suite, et pourtant une approche radicalement différente. Django Unchained était un pur western spaghetti dans lequel QT déversait toutes ses inspirations stylistiques pour offrir un spectacle explosif. Cependant, celui-ci était indéniablement un (génial) passage en zone de confort pour le cinéaste, ce qui rend son approche pour son film suivant d’autant plus intéressante. Dans Les Huit Salopards, il calme un peu son style, et opte pour une mise en scène plus précise, posée, afin de capter au maximum la tension, sans pour autant évincer la violence du récit. Tarantino prend des risques en se montrant moins démonstratif, mais se sert de son grand talent d’écriture pour tenir son film, avec des dialogues passionnants, servis par un casting cinq étoiles, permettant un crescendo de tension saisissant. A la manière de John Carpenter dans The Thing (également avec Kurt Russell), le cinéaste enferme ses personnages au sein d’un décor glacial, pour sonder l’humain, et découvrir qui de ces huit salopards n’est pas ce qu’il prétend être. Le 8ème film de Quentin Tarantino est un western aux allures de thriller, un grand jeu de dupes jouissif et violent, porté par l’excellente partition du génie Ennio Morricone, accentuant davantage la tension.

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24. WINTER SLEEP

Réalisé par Nuri Bilge Ceylan

Palme d’Or en 2014, le film du réalisateur Turc Nuri Bilge Ceylan avait pourtant de quoi rebuter : l’histoire gravite autour du gérant de l’hôtel d’un petit village d’Anatolie, et de sa relation avec ses proches, ainsi qu’avec les autres habitants. Pendant près de 3h15. Le film aurait largement pu être sans intérêt, mais c’était sans compter la présence d’un cinéaste aussi talentueux derrière la caméra et au scénario. Prenez une écriture de dialogues aussi fine et profonde que ceux des films d’Ingmar Bergman, et une mise en scène rappelant le cinéma d’Andreï Tarkovski, et vous avez Winter Sleep. Deux énormes comparaisons certes, mais pourtant pertinentes. La réalisation comporte effectivement de très belles idées tout au long du métrage, apportant également une ambiance assez chaleureuse dans cet hiver Turc, mais l’aspect le plus remarquable est l’écriture. Plus de trois heures durant, on regarde ces personnages discuter, réfléchir, s’aimer, rire, se disputer, tout ça avec une justesse absolument effarante, permettant au spectateur de constamment rester actif, et de réfléchir à ces dialogues, auscultant l’âme humaine avec une rare précision. Un des plus grands films de cette décennie et une confirmation que Ceylan est un des cinéastes les plus intéressants de notre époque.

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23. THE ASSASSIN

Réalisé par Hou Hsiao-hsien

Après de longues années à apprendre les arts martiaux auprès d’une nonne, Yinniang revient dans sa famille avec pour mission d’assassiner son ancien amour, nouveau gouverneur de la province de Weibo, tentant de ses soustraire aux autorités impériales. Hou Hsiao-hsien, le brillant réalisateur de La Cité des Douleurs et Millennium Mambo, vient se frotter au genre du « Wu Xia Pian », le film de sabre chinois, avec son nouveau long-métrage The Assassin. Chaque plan sidère par sa beauté picturale, sa capacité à capter l’essence d’une demeure traditionnelle, ou d’un décor naturel somptueux. Comme par exemple sur l’image ci-dessus, dans ce plan-séquence, les personnages se retrouvent au bord d’une falaise, et le brouillard (un vrai, pas numérique) vient peu à peu envahir tout le fond du cadre, donnant une dimension mystique à cette scène, grâce à une heureuse coïncidence naturelle. Les combats sont chorégraphiés avec une grande minutie, offrant des séquences d’action à la fugacité tranchante, dont le travail sonore amplifie la sensation de vitesse et la puissance des coups portés. On est ici à l’opposé de l’excellent Tigre et Dragon et ses combats spectaculaires. Dans The Assassin, tout est affaire de sobriété. Ne pas trop en faire, contrôler ses émotions, garder une économie de mouvements et de mots, notamment dans la mise en scène (primée à Cannes), où chaque geste meurtrier pourrait faire partie d’un ballet virtuose. Ce film dégage une poésie minimaliste absolument majestueuse, où les poings et les épées s’entrechoquent, dans une atmosphère silencieuse. Un véritable morceau de cinéma hors du temps, d’une splendeur visuelle rare.

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22. THE STRANGERS

Réalisé par Na Hong-jin

Na Hong-jin, réalisateur de l’excellent The Chaser, continue d’explorer le thriller avec The Strangers, sorti en 2016. On va suivre une équipe de policiers, enquêtant sur une série de meurtres dans un petit village Coréen. Seulement, l’origine de ces tueries est peut-être plus mystérieuse qu’il n’y paraît. Comme dans l’mmense Memories of Murder de Bong Joon-ho, les policiers sont ici un peu empotés, ce qui crée des situations assez décalées. Ils ne sont pas stupides pour autant et suivent tous les indices possibles, même parfois au détriment de leur intégrité physique. La force de The Strangers est sa capacité à naviguer entre les genres pour brouiller les pistes, flirtant régulièrement avec le surnaturel. Les perceptions et croyances des personnages (comme celles du spectateur), sont constamment ébranlées, remises en question, pour placer sans cesse l’homme face à sa peur de l’inconnu. A court de solutions, les personnages devront parfois recourir à des méthodes peu orthodoxes, en témoigne cette longue et saisissante séquence d’exorcisme réalisée par un chaman. En résulte un étrange thriller fiévreux, dont la recherche de la vérité mène aux portes de l’enfer. A ce titre, les 20 dernières minutes sont un véritable sommet d’horreur jusqu’au-boutiste, à l’imagerie aussi audacieuse que perturbante.

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21. YOUR NAME.

Réalisé par Makoto Shinkai

Probablement le film d’animation avec les plus beaux visuels que j’ai vu de ma vie. Mais au-delà de cette claque esthétique, un drame fantastique à travers le temps et l’espace, sur fond de chronique adolescente. Un savant mélange de tendresse et d’humour, au rythme d’une bande-originale mélancolique composée et chantée par le groupe Radwimps. Au fur et à mesure que les clés de ce récit à la construction astucieuse se dévoilent, son lyrisme se déploie doucement, pour laisser éclater sa force émotionnelle sur la dernière demi-heure. Makoto Shinkai fascine à travers cette dualité de paysages, entre un côté très moderne avec le Tokyo d’aujourd’hui, et un Japon plus traditionnel avec un petit village de montagne. Your Name est comme un rêve éveillé, d’une beauté saisissante, qu’on ne voudrait pas voir se terminer, et dont les petits détails du monde réel ne cessent de nous y ramener.

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20. THE MASTER

Réalisé par Paul Thomas Anderson

Paul Thomas Anderson est un des cinéastes les plus importants des 20 dernières années, et près de 5 ans après son immense There Will Be Blood, il revient avec The Master, nouveau thriller psychologique s’immisçant dans la vie d’une secte. Joaquin Phoenix livre une de ses meilleures performances dans le rôle de Freddie Quell, un vétéran alcoolique et inadapté social. En face de lui on retrouve le regretté Philip Seymour Hoffman (décédé en 2014), qui lui aussi est absolument magistral dans le rôle du leader de la « Cause ». PTA y délivre toute sa science du cadrage pour nous entraîner dans le désarroi psychologique de Freddie, et son face-à-face saisissant avec le « Master ». Un jeu de domination âpre et hypnotique, parfois déstabilisant, mais indéniablement fascinant. Lion d’Argent du Meilleur Réalisateur, et Prix d’interprétation pour le duo d’acteurs à la Mostra de Venise 2012.

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19. BLACK SWAN

Réalisé par Darren Aronofsky

Nina, danseuse de ballet, aspire au premier rôle dans la prochaine représentation du Lac des Cygnes, mais doit cependant arriver à faire ressortir le cygne noir de sa personnalité, qui colle davantage au cygne blanc. Lier le corps et l’esprit, abandonner son perfectionnisme, et lâcher prise face à ses démons intérieurs, telle est la tâche de Nina, incarnée avec brio par Natalie Portman. C’est dans la psyché de cette danseuse, que Darren Aronofsky (Requiem for a Dream) nous emmène, certes sans vraiment de subtilités, pour nous proposer un immense ballet noir au sein d’un esprit tourmenté par la perfection de ses imperfections, enfermé dans cette image de jeune femme réservée. Une descente aux enfers insidieuse, née d’une ambition maladive, à la mise en scène étouffante, rendant une expérience sensorielle, viscérale, et malsaine.

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18. INCEPTION

Réalisé par Christopher Nolan

Et si Inception était le meilleur film d’espionnage de la décennie ? Après sa pièce maîtresse qu’est The Dark Knight, il était difficile de penser que Christopher Nolan puisse reproduire une telle prouesse. Et pourtant, Inception est peut-être son film le plus abouti, celui qui rassemble toutes ses obsessions et qui définit le mieux son style cinématographique. Une œuvre labyrinthique, mais dont le scénario offre une clarté impressionnante sur la gestion de son concept, avec une mise en scène ultra maîtrisée et fourmillant d’idées, oscillant entre le grand spectacle et l’intime. Des séquences d’anthologies, accompagnées par l’excellente bande-son composée par Hans Zimmer, donnant encore plus d’ampleur à ces visuels impressionnants. Ces dernières années, beaucoup se demandaient si Christopher Nolan n’allait pas réaliser un film James Bond, mais il en a déjà fait un, car Inception est probablement ce qui s’apparente le plus à une mission de l’agent 007, s’il pouvait explorer les rêves des gens.

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17. GONE GIRL

Réalisé par David Fincher

Dernier film en date de David Fincher après le coup de maître qu’était The Social Network et sa très bonne adaptation de Millénium. Ici, il revient au polar, en s’intéressant à la vie d’un couple qui prendra un tournant dramatique. Le jour de leur 5ème anniversaire de Mariage, Amy disparaît, et la maison est saccagée. Nick, son mari se retrouve très vite accusé par la police et les médias, mais tente de découvrir la vérité. La narration est d’une fluidité impressionnante, bien aidée par un montage astucieux, et une mise en scène à nouveau extrêmement précise. Un récit dont les rouages se dévoilent peu à peu, dans une mécanique redoutable. De la disparition d’Amy, ancienne enfant-star, découle un tourbillon médiatique déterminé à porter aux nues le mari, cible idéale, et dont tous les indices semblent accuser. Gone Girl est un film sur les apparences, sur la façon de mettre en scène sa vie, et sur le rôle des médias. Au même titre que La Chasse, ce film est d’autant plus important dans cette ère post – « Me Too », où certaines dérives médiatiques ont lieu, par souci de ne pas perdre cette course à l’information. Ben Affleck et Rosamund Pike crèvent l’écran, dressant le portrait glacial d’un couple empoisonné par le narcissisme.

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16. LES ENFANTS LOUPS, AME ET YUKI

Réalisé par Mamoru Hosoda

Hana élève seule ses deux enfants, tout en essayant de cacher leur identité d’enfants loups. Mamoru Hosoda nous livre un magnifique conte sur l’acceptation de soi, la tolérance, et sur l’amour maternel. Voir cette mère se battre au quotidien pour s’occuper de ses enfants et les protéger du monde extérieur avec une telle abnégation, est absolument bouleversant. Pour Ame et Yuki, l’enjeu est de trouver sa voie, que ce soit en tant qu’humain ou en tant que loup. L’animation est superbe, et certaines séquences dégagent une poésie folle, portées par un puissant souffle de vie. Mamoru Hosoda nous emporte dans ce récit fleuve, d’une beauté et d’une justesse terriblement émouvante, pour nous parler avec élégance et tendresse d’amour et de tolérance.

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15. THE IRISHMAN

Réalisé par Martin Scorsese

À travers cette nouvelle grande fresque historique sur la mafia, Martin Scorsese livre probablement un de ses meilleurs films, mais aussi son plus émouvant, avec une dernière heure amenant une bouleversante réflexion sur la vieillesse, et les regrets. Une mise en scène et une narration magistrales, le tout fluidifié et rythmé par un travail de montage exceptionnel. Une apothéose du film de gangsters, dans laquelle le cinéaste se sert de ses explorations passées, pour aborder le genre sous un angle plus mélancolique, et aller encore plus loin dans l’étude de personnages. C’est également l’occasion d’assister à de grandes performances de la part d’acteurs légendaires comme Robert De Niro (rarement vu aussi émouvant), Joe Pesci, et Al Pacino, tous les trois réunis pour la première fois à l’écran, sous la direction d’un des meilleurs réalisateurs de tous les temps. Une très grande œuvre, qu’il est facile d’imaginer devenir un classique de la filmographie de son auteur.

Vous pouvez retrouver la critique complète ici.

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14. FIRST MAN

Réalisé par Damien Chazelle

Après l’immense succès de La La Land en 2017 et l’excellent Whiplash en 2014, Damien Chazelle revient, de nouveau avec Ryan Gosling, pour un biopic sur Neil Armstrong et son épopée lunaire. Après 2 films centrés sur la musique, cela semblait être une véritable sortie de sa zone de confort. Dans une histoire représentant un des plus grands accomplissements américains par un de leurs plus célèbre héros, Chazelle choisit l’approche inverse, centrée sur l’humain derrière l’exploit. A travers une mise en scène intimiste, optant pour des cadres très serrés sur Neil, on est plongés en immersion dans cette aventure humaine poignante. Une immersion davantage renforcée par un travail sonore extrêmement riche, permettant de percevoir le moindre bruissement de ferraille provenant des cockpits. Cela provoque immédiatement un sentiment d’insécurité, d’être avec le personnage dans une boîte métallique, prête à se démanteler en plein vol à tout moment. First Man est une véritable expérience de cinéma, immersive, mais aussi émouvante. En effet, si le talent de pilote de Neil en fait évidemment un excellent candidat pour Apollo 11, son parcours est tracé par la mort des gens qui l’entourent. Ce voyage porte tout le poids du deuil des amis de Neil, mais aussi et surtout celui de sa petite fille. Le film bénéficie également d’une bande-son signée Justin Hurwitz (le fidèle compositeur et ami du cinéaste), épousant l’intime à coups de notes très douces à la harpe, et d’autres titres plus épiques comme The Landing, accompagnant l’alunissage dans une des séquences les plus impressionnantes du cinéma Hollywoodien ces dernières années. L’équilibre entre la mise en scène, le montage et la musique est juste parfait et livre un morceau de bravoure absolument saisissant. Une brillante sortie de route pour Damien Chazelle, prouvant sa polyvalence et une nouvelle fois son talent, avec cette relecture bouleversante d’un des événements les plus marquants de l’histoire de l’humanité.

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13. THE SOCIAL NETWORK

Réalisé par David Fincher

Après plusieurs incursions mémorables dans le thriller avec Seven, Fight Club ou Zodiac, voir David Fincher s’attaquer à un biopic, qui plus est sur Mark Zuckerberg était un choix pour le moins surprenant. C’était sans compter sur la présence au scénario d’Aaron Sorkin, et sous-estimer les capacités du cinéaste. On est embarqués dès la séquence d’ouverture dans un récit au rythme tonitruant, sur la fondation de ce monstre digital qu’est devenu Facebook, à travers des dialogues brillants servis par des acteurs se donnant à fond. La mise en scène de Fincher est d’une précision chirurgicale, et sa caméra bouge avec une fluidité de mouvement presque imperceptible. Plus que l’histoire d’un surdoué ayant créé le plus grand réseau social depuis sa chambre universitaire, c’est aussi le portrait d’une société de l’instantané, où chaque acte est à la portée de millions de gens avec un seul clic, où tout est dépassé assez rapidement, au rythme d’une vie qui s’écoule à vive allure. Sorti fin 2010, à l’heure où Facebook étalait encore progressivement son implantation dans le monde, il est intéressant de voir à quel point le regard posé sur ce réseau et son influence sur les relations sociales était juste, et clairvoyant sur l’évolution de l’ère digitale entamée lors de cette décennie. Un exemple du genre en termes d’écriture et de mise en scène.

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12. HABEMUS PAPAM

Réalisé par Nanni Moretti

Lorsque le nouveau Pape élu refuse de se montrer au public et de suivre une psychothérapie pour remédier aux terribles doutes qui l’envahissent, c’est tout le Vatican, et toute la communauté catholique qui se retrouve dans une situation délicate. Dans cette comédie dramatique, le réalisateur Italien Nanni Moretti vient s’interroger sur ce qu’il se passerait si le Pape venait à avoir des doutes sur sa capacité à endosser son rôle et songeait à y renoncer. Le scénario est absolument fantastique, entre le questionnement existentiel du Pape (incarné à la perfection par Michel Piccoli, un de nos plus grands acteurs Français), la gestion des retombées médiatiques et sociales du Vatican qui ne peut pas annoncer le résultat du conclave, l’attente des cardinaux qui feront un tournoi de volley-ball pour tuer le temps, sous l’influence du psychiatre (campé avec malice par Nanni Moretti), ou encore l’épanouissement artistique du Pape au théâtre, puis cette fin magistrale, déployée avec peu de mots pour terminer sur un silence assourdissant… C’est un film absolument brillant dans son écriture, mais aussi très fort dans la mise en scène, permettant au cinéaste d’user de l’ampleur des décors pour écraser les personnages. Le film est d’autant plus remarquable qu’en 2013 le Pape Benoit XVI renonce à ses fonctions, une première depuis 600 ans, donnant au métrage une portée presque prémonitoire.

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11. PREMIER CONTACT

Réalisé par Denis Villeneuve

Peut-être un des films de science-fiction les plus intelligents depuis longtemps. Après l’apparition d’étranges vaisseaux aliens, Louise Banks, mère en deuil de sa fille, et linguiste réputée devra tenter de traduire un langage extra-terrestre dans un temps limité, pour éviter qu’une guerre se déclenche. Denis Villeneuve est décidément un des cinéastes les plus intéressants de ces dernières années. Après les excellents Prisoners et Sicario, il s’essaye pour la première fois à la science-fiction (puis y reviendra pour Blade Runner 2049 et son adaptation de Dune prévu pour fin 2020). L’angle choisi prend le contre-pied de la majorité des films d’invasion Alien, en se concentrant sur le langage. Une façon de montrer que le dialogue est la clé de toute relation sociale, puisqu’ici l’enjeu est d’éviter une guerre contre ces corps étrangers. Ce parti-pris saisissant est associé au talent de mise en scène de Denis Villeneuve, usant parfaitement de ses décors pour offrir une atmosphère mélancolique (certains plans semblent sortir d’un film de Terrence Malick), et d’une beauté étrange. Amy Adams trouve ici un de ses meilleurs rôles, et livre une performance très émouvante. Premier Contact est un superbe film de SF, émouvant, donnant matière à réfléchir, ne tombant jamais dans la surenchère d’effets, et aux partitions musicales envoûtantes de Max Richter et du regretté Jóhann Johansson.

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10. LE CONTE DE LA PRINCESSE KAGUYA

Réalisé par Isao Takahata

Le Conte de la Princesse Kaguya est peut-être le film qui représente le mieux la définition de la beauté. Une beauté d’abord plastique, avec ces dessins à l’encre de Chine et au fusain, mais aussi une beauté émotionnelle, avec cette histoire universelle d’une jeune femme prisonnière de son destin. Considéré comme un des plus anciens textes de l’histoire du Japon, Isao Takahata (Le Tombeau des Lucioles), fondateur du Studio Ghibli avec Miyazaki, s’attaque à un monument de la littérature. De toute évidence, il s’en sort avec brio, avec ce merveilleux conte humaniste, aux dessins somptueux. Une véritable fresque historique, absolument bouleversante, dont les coups de pinceau délicats donnent vie à toutes les jolies nuances de ce récit. Tout est exécuté avec une subtilité et une douceur incroyable, pour venir déverser toute sa charge émotionnelle dans des séquences d’une grâce infinie, portées par la sublime partition musicale de Joe Hisaishi. Un véritable chef d’œuvre cinématographique, pas seulement du cinéma d’animation, mais aussi une des pièces maîtresses du Studio Ghibli, et le dernier cadeau du regretté Isao Takahata, décédé en 2018.

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9. PARASITE

Réalisé par Bong Joon-ho

Que dire de plus sur Parasite, la dernière pièce maîtresse de Bong Joon-ho ? Le scénario est extrêmement bien structuré, nous emportant dans un thriller à l’engrenage infernal, sous fond de lutte des classes. La mise en scène, très intelligence et subtile, est également d’une précision redoutable. Parasite mérite sa Palme d’or ainsi que toutes les louanges internationales à son sujet. Nul doute que ce film sera considéré comme un classique du cinéma coréen, s’imposant comme un très grand film d’un des meilleurs réalisateurs de ce siècle, tout simplement.

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8. PHANTOM THREAD

Réalisé par Paul Thomas Anderson

Il était premier de mon Top 2018, ce qui rend sa position ici tout à fait légitime. Un des plus grands films de Paul Thomas Anderson, lui-même un des meilleurs réalisateurs actuels, mais aussi une des plus grandes performances de cette décennie, avec un Daniel Day-Lewis tourmenté et majestueux, dans ce qui semble être le dernier rôle de son illustre carrière. Un grand cru.

Pour voir la critique complète, c’est ici.

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7. THE GRAND BUDAPEST HOTEL

Réalisé par Wes Anderson

Ce film est probablement le sommet du style de Wes Anderson. Des décors très colorés, symétriques et fourmillant de détails, une galerie de personnages (au casting prestigieux) hauts en couleurs, un montage cartoonesque, et un humour absolument délicieux. On se laisse embarquer d’emblée aux côtés de Monsieur Gustave et de son Lobby Boy, Zéro, pour une aventure endiablée entre meurtres, évasions, courses-poursuites, et fusillades. La mise en scène de Wes Anderson bouillonne d’idées presque à chaque cadre, travaillant les perspectives, les détails du décor, les arrières-plans, les formats d’image… Tout ça au service d’un récit extrêmement divertissant, parfaitement orchestré et rythmé, sans fioritures, proposant un vrai moment de cinéma original qui transpire le style de son auteur. Un régal.

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6. HER

Réalisé par Spike Jonze

Dans un futur proche à Los Angeles, Theodore se remet difficilement de sa séparation avec sa femme. En achetant un système d’exploitation intelligent, il fera la connaissance de la voix de Samantha, avec qui il tissera des liens de plus en plus intimes. Sous la proposition d’un récit d’anticipation, Spike Jonze nous délivre une émouvante réflexion sur l’amour et la solitude. Her est un film scintillant de tendresse, avec une photographie aux couleurs pastel et une bande-sonore très douce composée par Arcade Fire. Joaquin Phoenix est une nouvelle fois brillant de vulnérabilité, et la voix suave de Scarlett Johansson fait des merveilles pour donner une épaisseur à cette intelligence artificielle, voulant s’émanciper de sa condition et développer des émotions. Comme un miroir de Lost in Translation (également avec Scarlett Johansson), qui parlait de la solitude, notamment au sein d’un mariage, Her l’aborde dans la phase du divorce. Ce n’est d’ailleurs pas anodin puisque Sofia Coppola et Spike Jonze ont divorcé après plusieurs années de mariage. Her est l’un des scénarios les plus originaux et brillamment écrits de la décennie, et comporte des idées de mise en scène sublimes, empruntant parfois au cinéma de Terrence Malick. Une véritable merveille de sensibilité, qui saura certainement vous réchauffer le cœur.

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5. BLADE RUNNER 2049

Réalisé par Denis Villeneuve

Succéder à l’un des plus grands chefs-d’œuvre de la science-fiction n’est pas une chose aisée, mais la présence de Denis Villeneuve (réalisateur de la décennie ?) derrière la caméra, épaulé par un des meilleurs directeurs de la photographie, Roger Deakins, était déjà assez rassurant. En 1982, on adoptait le point de l’humain, ici on suit le parcours d’un réplicant, incarné par Ryan Gosling. Ici, Blade Runner 2049 arrive à réactualiser les thématiques de son illustre prédécesseur en les amenant encore plus loin. Le récit est long, lancinant, nimbé dans une atmosphère viscérale, notamment grâce à la musique d’Hans Zimmer, mais aussi à la mise en scène de Villeneuve, sublimée par le fantastique travail de photographie qu’a effectué Deakins. C’est simple, presque chaque plan est un tableau. Là n’est pas la question de savoir s’il est meilleur que le film de Ridley Scott, en revanche cette suite propose une expérience cinématographique saisissante, et permet une réflexion sur la condition humaine, mais aussi sur la création de la vie.

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4. SILENCE

Réalisé par Martin Scorsese

La Foi a toujours parcouru d’une manière ou d’une autre la filmographie de Martin Scorsese. Que ce soit explicitement dans La Dernière Tentation du Christ, ou plus subtilement dans Les Nerfs à Vif et A Tombeau Ouvert. Ici, dans Silence, le cinéaste s’intéresse au Japon du 17ème siècle, pour conter l’histoire de missionnaires jésuites partis pour retrouver leur mentor disparu. L’affaire se complique lorsque les deux hommes se rendent compte que les chrétiens sont torturés et tués s’ils refusent « d’apostasier », c’est-à-dire renier leur religion, en piétinant une image de Jésus. Le sujet s’avère passionnant, permettant un questionnement profond sur la Foi et la souffrance. Doit-on mourir pour préserver ses croyances ? C’est ce à quoi les personnages, incarnés par Andrew Garfield, Adam Driver et Liam Neeson, sont confrontés tout au long du récit. Le cinéaste New-Yorkais est venu chercher des inspirations visuelles chez Akira Kurosawa, Kenji Mizoguchi, ou encore Yasujiro Ozu pour leur science du cadrage, mais aussi chez Ingmar Bergman pour les questions métaphysiques présentes, entraînant un déchirement de l’âme chez les personnages. Une œuvre d’une maîtrise visuelle et narrative épatante, qui prouve que Martin Scorsese ne cesse d’explorer de nouvelles choses au cinéma, ce qui est est passionnant à voir pour un cinéaste de son âge.

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3. LA LA LAND

Réalisé par Damien Chazelle

Je pourrais vous parler des heures de La La Land, car c’est tout simplement un de mes films préférés. Pourtant, sans y être réfractaire, je ne peux pas dire que la comédie musicale fasse partie de mes genres de prédilection. Mais je suis passionné de cinéma avant tout, et La La Land me donne à peu près tout ce que je recherche dans un film. La La Land c’est une histoire d’amour émouvante, jamais niaise, parfois drôle, avec des personnages attachants, incarnés par deux acteurs (Ryan Gosling et Emma Stone) qui crèvent l’écran.C’est une lettre d’amour au cinéma et à l’art en général, proposant une réflexion sur la passion artistique, et comment cela peut affecter notre vie personnelle. C’est aussi un vibrant hommage aux grandes comédies musicales de Jacques Demy, Fred Astaire, Ginger Rogers, et Stanley Donen, dont Chazelle s’inspire, tout en réussissant à s’approprier cette grammaire visuelle si particulière pour raconter une histoire qui lui est propre. C’est une virtuosité technique de chaque instant, conjuguant une mise en scène tantôt virevoltante, tantôt intimiste d’une maîtrise épatante, et une photographie proposant des visuels éclatants de beauté à travers une palette de couleurs très riche et des jeux de lumières sublimes et audacieux. C’est aussi une comédie musicale se servant de ses (fantastiques) numéros musicaux pour raconter quelque chose sur les personnages, ou sur la ville de Los Angeles (dont un des surnoms est La La Land), au lieu de simplement combler un vide narratif que bien d’autres films du genre semblent faire. C’est aussi 10 dernières minutes d’une rare beauté, et un échange de regard final dévastateur. Enfin, c’est une ode aux rêveurs, ceux qui souhaitent par-dessus tout concrétiser leurs plus grandes aspirations. « La passion, c’est communicatif. » nous dit Mia. En tous cas, il est vrai que la passion de Damien Chazelle pour son art ne l’aura jamais autant été.

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2. MAD MAX : FURY ROAD

Réalisé par George Miller

En 2015, George Miller nous a présenté le reboot de sa trilogie Mad Max avec Fury Road, censé lui donner un second souffle. Ce n’est pas seulement un bon film qui fait repartir les moteurs comme il faut, c’est carrément une leçon de cinéma. Près de 2 heures qui semblent en durer la moitié, avec ces courses poursuites absolument dantesques qui s’enchaînent. Tom Hardy récupère ici le rôle culte de Mel Gibson, mais la vraie star ici, c’est Charlize Theron. Son personnage de Furiosa mène le film vers un propos profondément libertaire et féministe, en plus d’être sacrément badass. Les scènes d’action sont à couper le souffle, grâce à une mise en scène survitaminée et un montage impressionnant, rendant à la perfection ce mélange de vitesse et de chaos qui parcourt le film. Un spectacle ébouriffant, où George Miller nous emmène avec une immense virtuosité dans ce monde post-apocalyptique gorgé de ferraille et de sang. Le meilleur film d’action de la décennie, et peut-être même depuis longtemps.

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1. TREE OF LIFE

Réalisé par Terrence Malick

Difficile de mettre des mots sur ce film tant il est riche et déstabilisant. Tout est dans ce film, un récit universel sur la vie d’une famille, transposé au sein d’un canevas gigantesque sur l’existence de tout être vivant sur Terre et sur le lien à la nature. Jessica Chastain et Brad Pitt sont excellents, au même titre que ces enfants (comptant le jeune Tye Sheridan, évoqué plus tôt dans ce Top). La mise en scène de Malick touche au sublime, portée par l’éblouissante photographie d’Emmanuel Lubezki. A cela s’ajoute une musique donnant au récit une grâce incommensurable. Au doux lyrisme de la vie d’une famille se mêle la création du cosmos et de la vie sur Terre, pour établir un questionnement métaphysique sur la place de l’être humain dans tout cela. Un véritable film monde. Un grand poème cinématographique, repoussant les limites du septième art. Probablement pas mon film préféré de cette décennie, à ce titre certains du Top 10 seraient placés devant, mais c’est certainement celui qui m’impressionne le plus. Le jury présidé par Robert De Niro en 2011 lui a remis la Palme d’Or, la seule pour Malick jusqu’ici, mais certainement la plus belle, récompensant son plus grand chef-d’œuvre.

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