US – CRITIQUE

Après un Oscar du meilleur scénario original pour son très prometteur et remarqué Get Out, Jordan Peele revient pour nous embarquer encore une fois dans un cauchemar. Mais comme avec Get Out, dont le postulat lui permettait de dénoncer le racisme ordinaire, dans Us, il pose un constat sur l’Amérique d’aujourd’hui.

Peele est également occupé à nous présenter un reboot de l’excellente série La Quatrième Dimension (« The Twilight Zone » en VO), ce qui constitue un challenge de taille mais néanmoins intéressant à notre époque. Avec une carrière en plein essor, est-ce que son nouveau bébé horrifique est à la hauteur des attentes ?

C’est un grand OUI. Il fait preuve d’une véritable maîtrise de mise en scène, très efficace, sans s’encombrer d’effets grossiers. C’est grinçant, viscéral, et angoissant comme il faut. A travers un récit en miroir (au sens propre comme au figuré), le cinéaste établit un constat assez fort sur la violence aux États-Unis de nos jours. Il est très clair que le message qu’il souhaite faire passer est que le problème vient des américains, leur culture de la violence, les inégalités sociales et raciales… Il les oblige à se regarder dans le miroir. Même le titre a un double sens significatif : « Us » veut dire « nous », mais il veut également faire penser à United States, et ce, de manière assez évidente quand un double déclare « We’re americans. »

L’ambiance est très réussie, grâce à la photographie, qui joue habilement des lumières et couleurs pour offrir des visuels assez inquiétants. Le travail sonore contribue également à cette atmosphère stressante, mettant l’accent sur des sons qui peuvent sembler anodins mais qui vont rendre angoissant des lieux pourtant rassurants en temps normal.

Ce sentiment de malaise est davantage renforcé par la performance des acteurs, notamment dans l’incarnation de leur double. Si tous les membres de la famille sont vraiment bien interprétés, c’est bel et bien Lupita Nyong’o qui sort du lot. Elle brille dans deux rôles très différents (mais liés), et livre à mon sens déjà une des meilleures performances de cette année 2019. Dans un second rôle, l’actrice Elisabeth Moss (The Handmaid’s Tale) se distingue également et impressionne. Ces personnages étonnants sont terrifiants et accentuent le caractère imprévisible des événements.

Le dernier acte est également très intéressant dans sa dimension cathartique, magré quelques maladresses, notamment dans le discours final de l’antagoniste, trop explicatif, et qui atténue la cohérence du concept.

Jordan Peele signe ici un très joli coup avec ce « home invasion » diablement efficace, et effrayant. Il se permet quelques touches d’humour bien dosées, n’effaçant jamais l’horreur des séquences. La grande force de son long-métrage est sa capacité à dresser un portrait terriblement lucide des problèmes de violence aux États-Unis. Get Out était déjà très prometteur, mais là, le metteur en scène semble avoir passé un cap.

Ce qui est d’autant plus impressionnant, c’est qu’en seulement 2 films, il s’est forgé une véritable identité cinématographique, un vrai style identifiable assez facilement. Plusieurs visionnages seront probablement nécessaires pour repérer tous les petits détails disséminés tout au long du film, qui ont tous leur importance malgré leur aspect totalement anodin de prime abord.

Vous allez frissonner, rire, vous sentir mal à l’aise, et probablement avoir besoin de temps pour vous remettre de votre visionnage, qui vous prendra certainement aux tripes. D’ores et déjà un des meilleurs films de l’année.

Bande-annonce :

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